Les opposants à l’usine de retraitement de batteries ne baissent pas les bras. Leur présidente, Denise Schneider, dénonce un traitement partiel du dossier et entend réclamer justice pour toutes les victimes d’intoxication, sans exception.
On aurait pu croire l’affaire terminée avec la condamnation de Métal Blanc par la Cour de Cassation en septembre dernier, mais il n’en est rien. L’association de protection et de défense de l’environnement de Bourg-Fidèle entend lancer une nouvelle action en justice devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme. « Nous avons le sentiment d’un déni de justice », a déclaré sa présidente Denise Schneider à l’occasion de l’assemblée générale de l’association.
L’arrêt incriminé n’a pas retenu certains cas de personnes contaminées par d’autres métaux que le plomb. Patrick, père de deux enfants « intoxiqués à tout » et dont l’épouse Marjorie souffre de la thyroïde, connaît les conséquences d’une telle mise à l’écart. Il habitait à 300 mètres de l’usine. Les analyses, les traitements coûteux de son fils Sullivan ne sont pas pris en charge par la Sécurité Sociale. L’adolescent n’est pas considéré comme une victime de la pollution Métal Blanc, parce qu’il est intoxiqué – entre autres – au cadmium, un polluant non retenu par l’arrêt de la Cour de Cassation.
Denise Schneider est en colère aussi, parce qu’elle estime que l’usine de retraitement des batteries usagées devrait fonctionner en vase clos, selon les experts. « Les particules fines ne sont pas filtrées », affirme-t-elle. « Ce sont les plus dangereuses ».
Eric Andry, maire de Bourg-Fidèle, intervient. Il rappelle tout d’abord que le village a un long passé industriel. Sur l’ancien site Péchenard, un taux de plombémie important a été relevé. En fait, la moitié du territoire communal serait confronté à ce problème. Difficile de faire la part des choses. L’élu bourquin précise aussi qu’il est en relation régulière avec la direction et que des comptes-rendus mensuels sont à la disposition du public en mairie.
Un désastre environnemental
Un troisième point motive le sentiment de déni de justice ressenti par Denise Schneider et ses amis. La terre, l’eau sont pollués pour des siècles peut-être. Plus question de jardiner. Les éleveurs ont beaucoup souffert pour leur part.
René Béroudiaux, agriculteur à Rocroi, où il est conseiller municipal, possède des pâturages au Cheval Blanc, à 800 mètres de l’usine. Ses bêtes boivent dans des mares naturelles. Il en a perdu 100. Trois collègues ont subi également d’importantes pertes. Aujourd’hui, M. Béroudiaux n’est toujours pas indemnisé, mais il ne déplore plus de mort suspecte dans son cheptel. Ses bêtes boivent dans les mêmes mares. « Ça prouve que les choses vont mieux », admet-il.
Des poissons réapparaissent dans la Murée. L’interdiction de pêcher, de faire trempette ou de laisser boire les bovins reste néanmoins d’actualité. Le plomb stagne dans les sédiments, qu’il est techniquement impossible de dépolluer (comme les sols, d’ailleurs). Une borne verte, financée par le Conseil Général, a été installée à la mairie.
Les agriculteurs disposent de 1 500 m3 d’eau gratuits pour abreuver leurs bêtes. Cette eau est payée par la commune. « Ça fait une belle facture », commente M. Andry avant de préciser que le sujet a été évoqué lors du dernier conseil municipal.
Les prés reverdiront-ils un jour sur les rives de la Murée ? Nul ne le sait. Au vu de son expertise dans le domaine des pollutions par les métaux lourds, Denise Schneider est devenue « lanceur d’alerte », encouragée par Marie-Christine Blandin, sénatrice verte du Nord. Elle envisage d’écrire un livre. Pour témoigner de ces années de lutte qui – visiblement – l’ont épuisée, même si elle reste combative.