A l’invitation de l’association Ensemble pour Aurélien et Jason (Epaj), une psychologue lilloise vient d’assurer à Bourg-Fidèle une formation à la méthode A.B.A. qui s’adressait à tous les acteurs de l’autisme, familles et professionnels.
Adrienne Vanlaer est psychologue spécialisée en A.B.A (applied behavior analysis), une méthode qui pratique l’analyse appliquée du comportement. Elle travaille principalement avec des enfants autistes ou atteints de troubles envahissants du comportement. La jeune femme est installée en libéral depuis quatre ans et travaille à domicile, dans les familles. Par choix, elle n’a pas de cabinet. Adrienne se rend sur place pour voir où sont les problèmes et ce qu’il est possible de mettre en place. Son travail, c’est d’apprendre aux enfants à devenir autonomes, à parler, à progresser au niveau scolaire, et faire diminuer leurs troubles.
@rdenne-mag : Comment s’y prendre pour aider son enfant à progresser ?
Adrienne Vanlaer : C’est là que les trois jours de formation ont été utiles. On se base sur les principes de l’A.B.A. En étudiant les lois du comportement humain, on s’est aperçu qu’ils étaient tous régis par les mêmes grands principes. On va s’en servir pour les appliquer aux enfants autistes, les motiver à apprendre. A l’inverse, en ce qui concerne les troubles du comportement, on part du principe que si les enfants les émettent, c’est qu’ils obtiennent quelque chose d’agréable en retour. On va faire en sorte qu’ils n’obtiennent plus ces choses agréables suite à leurs troubles, mais qu’à l’inverse, ils puissent obtenir ce qu’ils aiment en le demandant de manière adaptée.
@-m : Votre but est-il la socialisation ?
A.V. : Clairement. A terme, les objectifs, c’est que les enfants aient la vie la plus « normale » possible. S’ils ont été pris en charge assez tôt et de manière assez intensive, c’est tout à fat possible qu’ils aillent à l’école seuls, sans AVS (ndlr : auxiliaire de vie scolaire) et qu’ils aient une vie normale. Mais c’est vrai pour ceux qui ont une prise en charge A.B.A. intensive et précoce, si possible avant trois ans, et quarante heures par semaine. Il ne s’agit pas de travail, mais de stimulation. On profite de chaque occasion pour faire progresser l’enfant.
@-m : Cette prise en charge n’est-elle pas coûteuse ?
A.V. : Au départ, oui. Sauf qu’à long terme… Enfin, si on changeait complètement la politique d’accueil de ces enfants-là, si on mettait en place une prise en charge bien intensive quand ils sont petits et qu’après on n’ait plus rien à mettre en place, qu’il n’y ait ni institution, ni structure adaptée, ce serait quand même un gros gain d’argent. Il s’agit donc de transformer le fonctionnement actuel , là où on met les enfants à l’écart en institution et où ils restent toute leur vie. L’idée, c’est de mettre beaucoup d’argent au début, beaucoup de moyens personnels. Mais ce n’est même pas de l’argent. Ca ne coûte pas si cher comparé à un prix de journée en établissement, mais ça veut dire qu’une personne doit se trouver constamment avec l’enfant. Si elle est là intensivement et qu’elle mette bien en place la prise en charge, vous laissez l’enfant vivre seul et il n’a plus besoin d’accompagnement. L’économie financière est énorme.
@-m : EPAJ aimerait créer à Bourg-Fidèle un centre A.B.A. L’idée vous semble-t-elle pertinente ?
A.V. : Je pense que c’est un bon projet, parce qu’ici les familles ne trouvent pas ce dont elles ont besoin. J’habite Lille. Du coup, je ne peux pas me rendre souvent à Bourg-Fidèle. Il faudrait que je sois là beaucoup plus régulièrement pour faire progresser les enfants plus rapidement.
@-m : C’est-à-dire ?
A.V. : Je ne fais que superviser, j’interviens peu auprès de l’enfant. Je vais plutôt élaborer les objectifs, dire comment travailler avec lui. Il faudrait, si possible, que je le voie tous les jours. Sur les prises en charge que j’ai à Lille et qui sont un peu moins intensives, une rencontre hebdomadaire peut suffire à réajuster tous les objectifs et à donner de petits conseils si les intervenants sont formés. Les personnes qui sont au quotidien avec l’enfant doivent être formées à l’A.B.A. pour qu’on voit de réels progrès.
@-m : Un centre local A.B.A. aiderait donc les parents ?
A.V. : Je crois que c’est une bonne alternative, parce que là, pour le moment, on n’a pas les solutions. Les enfants risquent de sortir assez vite de l’école car ils ont pris un retard scolaire important. Donc, s’ils peuvent avoir sur place une structure adaptée qui les stimule, qui les fasse progresser, c’est super. Malheureusement, en France, les centres A.B.A. sont surtout à l’initiative des parents, pas encore à celle de l’Etat. Il faudra qu’Ensemble pour Aurélien et Jason trouve un financement. C’est compliqué, mais je pense vraiment que ça en vaut la peine.