En tant que Président de l’Office du Tourisme, Hubert Brodier se bat bec et ongles pour la promotion du tourisme à Revin. En tant qu’homme, l’agonie de l’économie ardennaise et la disparition de son savoir-faire le révoltent. Paroles d’un homme en colère.
ardenne-mag : Vous êtes ici depuis 9 heures du matin. Que vous inspire cette journée ?
Hubert Brodier : Je suis déçu par le fait qu’il n’y a pas tellement de monde pour l’évènement, alors que ça concerne tous les Revinois. J’ai l’impression qu’un fatalisme se développe dans notre vallée, pas seulement à Revin, mais un peu partout. On se croit battus d’avance et, du moment qu’on touche une prime de licenciement, on ne pense pas à l’avenir.
a-m : Est-ce une critique vis-à-vis des Porcher ?
H.B. : Je crois qu’ils ont été assommés par l’annonce de la fermeture. Il n’y a pas eu vraiment de réactions. Je pense que les salariés ont pensé davantage à négocier leur départ, mais c’est général. On ne lutte plus pour conserver le travail, parce qu’il n’y en a pas, surtout dans notre région. On le sait bien. Alors, chacun bataille pour son destin individuel. C’est dommage, parce qu’on voit bien que, industriellement, on va devenir un désert. (La sirène retentit.)
a-m : Croyez-vous à la réindustrialisation des Ardennes, de la vallée de la Meuse ?
H.B. : Si nous devons conserver un peu d’industries, il s’agira de petites unités, mais elles ne remplaceront jamais l’emploi industriel perdu. Je n’imagine pas une grosse entreprise venir s’installer dans un lieu enclavé comme Revin, alors que certaines zones ont déjà du mal à attirer dans les Ardennes. Ces zones se trouvent pourtant à proximité de l’autoroute et elles ont quand même du mal à attirer des entreprises.
a-m : Quelle réflexion vous inspire ce constat ?
H.B. : C’est dommage, parce qu’on a des gens qui ont travaillé toute leur vie et qui avaient des compétences. Il existe ici un professionnalisme qui va se perdre. La tradition va disparaître. Passer à autre chose, ce sera très dur, à mon avis. Ce qui se déroule là est catastrophique pour Revin.
a-m : Quel reproche pourriez-vous adresser à Ideal Standard ?
H.B. : Il faut voir qu’ils ont pris la marque Porcher. Et ils ont laissé tomber le site de Revin, parce que ça fait longtemps qu’ils n’investissent plus.
a-m : Pour vous qui voyagez beaucoup, les sanitaires Porcher méritent-ils leur réputation ?
H.B. : Franchement, on en voit partout. Donc, c’est quelque chose qui représente une image. Ce ne sera plus fabriqué à Revin, alors que la réputation de la marque est quand même le résultat du boulot de personnes de Revin, depuis des générations. Et ce travail-là, cet héritage-là, n’aura plus rien à voir avec Revin. Il ira je ne sais où, mais plus à Revin. C’est quand même un peu fort. Ce sont de drôles de pratiques. C’est inadmissible.