Lors de la Fête de la lecture, qui s’est déroulée en octobre dernier, à l’Espace Jean Vilar, la femme de lettres revinoise a présenté ce texte plein de légèreté, ponctué par des expressions « tout de rouge ». @rdenne-mag vous le fait découvrir.

Le rouge a inspiré les auteurs lors de la Fête de la lecture 2011, organisée par Lire Malgré Tout. (Photo @rdenne-mag)
TOUT DE ROUGE
C’était une belle journée de mai.
Je revenais de la banque où j’avais nourri mon compte pour le sortir du rouge. J’attendais face au passage clouté quand Eugène, un bon copain, s’arrêta au feu rouge et me fit signe de monter dans sa C3.
Eugène, c’est une force de la nature. Puissant, impulsif, faut pas l’énerver, il voit rouge plus souvent qu’à son tour. Il a du sang de taureau, dit sa femme.
Bref, nous étions contents de nous retrouver, lui et moi. Nous avons fêté ça comme d’habitude, au bar « La lanterne rouge ». Oui, c’est vrai, avant c’était un lieu un peu glauque, mais ça ne l’est plus depuis le changement de proprio. Le patron, Maurice dit Momo, est taquin au point d’être lourdaud. Une fois de plus, il a tourmenté l’Eugène qui – selon lui – n’a nul besoin de nez rouge ou de rideau rouge pour faire le clown. Dès qu’il se montre, on a envie de dérouler le tapis rouge tant il paraît toujours en représentation. C’est vrai, mon ami aime être remarqué. Mais, maladroit comme toujours, Momo a ajouté que son embonpoint le porte à la comédie, à la bouffonnerie.
Quoi ? s’insurgea Eugène, tu dis que je suis un bouffon ?
À peine le chiffon rouge agité, il a sorti le grand jeu : cris et colère, grands gestes furieux. Le rouge lui était monté au front dès les premiers mots de Momo. Je dois avouer que nous avions déjà éclusé pas mal de verres de gros rouge et que l’excitation était vive.
Momo en a bavé ce jour-là. J’étais rouge comme un coq ou rouge comme une pivoine, c’est pareil. Eugène tirait à boulets rouges sur tout ce qui s’opposait à lui. Les consommateurs d’étaient érigés en arbitre et tous montraient le carton rouge. Mais quand l’Eugène est déchaîné, rien ne peut l’arrêter. Ce fut une mêlée générale. Y avait que le poisson rouge qui était un peu tranquille. C’est dire !
À plus d’une vingtaine, on s’est retrouvés aux urgences, qui avec le pif rouge comme une tomate ou l’œil au beurre noir, des dents cassées, doigts foulés, et même quelques fractures de l’avant-bras et de la mâchoire !
Les toubibs parlaient de déclencher l’alerte rouge. Je ne sais même s’ils rigolaient !
C’était une très belle journée de mai…
Agnès SCHNELL
Merci Geneviève !
Ce texte n’avait aucune prétention littéraire si ce n’était de montrer l’importance de la couleur rouge dans les expressions du langage courant…