Conseiller municipal de Pouru-Saint-Remy, Emmanuel Jacquemin a entamé une grève de la faim fin mai 2013 pour protester contre la politique du Ministère de l’Education nationale qui, à ses yeux, risque de tuer l’école rurale. En marge de la manifestation prévue demain devant la Préfecture (lire par ailleurs), nous avons décidé de lui donner la parole.
- Emmanuel Jacquemin entend bien résister à la mise à mort du système éducatif en milieu rural. (DR)
« Elu du pays Sedanais, j’ai entamé le 31 mai une grève de la faim pour dénoncer le passage en force inacceptable du Directeur Académique des Services de l’Education Nationale (DASEN) pour mettre en place une politique de réduction de moyens (fermeture de filières, de sections d’enseignement général pour des lycées, de collèges, d’écoles en milieu rural).
La baisse de démographie ne peut justifier à elle seule la fermeture de nos écoles. Elle ne peut pas non plus imposer à nos enfants des temps de transport inacceptables (jusquà 2h30 quotidiennement). C’est pourtant l’argument premier avancé par le DASEN. Depuis 8 mois, le protocole démocratique d’instruction de la restructuration de la carte des établissements, certes consultatif, est bafoué par les cadres du rectorat (DASEN et Recteur).
Une politique de « terreur » a été instaurée afin de museler les contestataires. [exemple n°1: pour s’être rendue au Tribunal Administratif de Châlons-en-Champagne à deux reprises pour une demande en référé contre le Rectorat, une directrice d’école s’est vu recevoir une lettre de sanction administrative pour avoir « abandonné » son poste de travail, bien que son remplacement ait été préalablement prévu.
Cette personne, outre sa fonction professionnelle, est par ailleurs représentante des parents d’élèves au Lycée de Bazeilles (lycée polyvalent où la fermeture de l’enseignement général a été acté avant la fin du processus consultatif).
Exemple n°2 : le Docteur Bruno Deswaene, maire de Sy, village du Canton de Le Chesne, s’est vu retiré, sans justificatif , son agrément à la MGEN, sous la pression du DASEN, pour avoir dynamisé une Association de parents d’élèves contre la suppression de l’unique collège de son Canton. Ce praticien spécialisé en psychologie, enseignant à la faculté de Reims, intervenait auprès des enseignants de l’Education Nationale pour la gestion du stress. D’autres exemples encore peuvent se rajouter à la liste.]
Monsieur Vincent Peillon, ministre de l’Education Nationale, avait pourtant déclaré qu’il n’y aurait pas de passage en force et que le redéploiement des moyens se ferait dans la concertation et pour le bien-être de l’enfant.
Aujourd’hui, c’est tout l’inverse que nous connaissons et à l’heure où les rythmes scolaires sont instaurés au seul bénéfice de l’enfant, on leur inflige des durées de transport inacceptables.
Ces raisons évoquées de manière non exhaustive m’ont acculé à opter pour ce mode de résistance, où, à la veille des vacances, nous n’avions plus d’autre choix.
Cette action qui peut apparaître comme du chantage pour certains est avant tout un cri de désespoir, le seul moyen d’expression d’un représentant des faibles contre le Pouvoir en place. Se joue en toile de fond de cet abandon de l’Etat par le retrait des services publics, une désertification accélérée de nos territoires ruraux et le plongeon de leur économie.
D’après l’OCDE, en 2100, 80% de la population mondiale vivra en zone urbaine; nous n’accepterons pas d’aller vivre en ville. »
Emmanuel Jacquemin