Depuis l’annonce de la fermeture de la filière STG à Givet, la Pointe affute ses arguments contre ceux qu’elle accuse de vouloir la mort du lycée Vauban. La construction d’un nouveau lycée sur les hauteurs d’Orzy fait peur et les propos s’emballent, à tel point que le président du Conseil régional a jugé nécessaire d’effectuer une mise au point, ce mardi, après la pose de la première pierre.

Jean-Paul Bachy a défendu une politique d'avenir pour les Ardennes et la région. (Photo @rdenne-mag)
L’actuel lycée Jean Moulin est un quinquagénaire à bout de souffle. Sa structure est de type Pailleron, du nom de ce collège parisien détruit en 1973 par un incendie criminel en 1973. Lors de ce drame, 20 personnes – dont 16 collégiens – avaient trouvé la mort. Depuis, plusieurs autres établissements de ce type ont été détruits par le feu.
On comprend donc mieux l’urgence d’une reconstruction. Tout le monde aurait dû applaudir au projet, mais c’était compter sans l’actualité académique. La fermeture de la filière STG à Givet et son déménagement à Revin sont mal vécus. Et de « bonnes âmes », selon l’expression du député-maire Philippe Vuilque, souffleraient sur les braises en murmurant que les millions investis par le Conseil Régional dans sa ville risquent de mettre en péril d’autres lycées.
« Je pense qu’on devrait être collectivement satisfaits de cet investissement important qui va transformer l’image éducative du nord du département », s’est défendu l’édile, conforté dans son opinion par un Président de région remonté contre ceux qui font passer les intérêts locaux avant l’intérêt général.
Solidaires
Pour tordre le cou à la désinformation et à la récupération politique, Jean-Paul Bachy s’est d’abord adressé aux enseignants, réaffirmant qu’il était hors de question dans l’esprit du Conseil régional d’opposer les personnes les unes aux autres et que si la Région investissait « sur la modernisation d’un lycée hors d’âge, qui présentait en termes d’hygiène et de sécurité des risques qu’il était inacceptable de laisser se perpétuer », elle n’en oubliait pas les autres pour autant.
Le président Bachy a fustigé le passéisme en termes colorés : « Nom d’une pipe ! que les gens soient enfin solidaires ! Si le mot solidarité veut dire quelque chose, quelque part, c’est bien ici, dans la vallée de la Meuse. Dire qu’à 20 kilomètres de distance, ce qui se fera ici ne se fera pas là, et que le destin des autres condamne le destin des premiers, ce sont des discours d’un autre âge. »
Selon son président, la Région est décidée à mettre à la disposition des uns et des autres des équipements, une offre pédagogique et un accompagnement des études qui soient satisfaisants, de manière à proposer une offre globale dans la Vallée de la Meuse qui soit à la hauteur des attentes de chacun.
Ceci dans un contexte de régression budgétaire, et alors que le Ministère de l’Education Nationale gère les postes, engagé qu’il est dans une stratégie de restriction des moyens. Les fermetures de classes ou de filières ne sont pas le fait des élus locaux, a rappelé en substance Jean-Paul Bachy.
« Nous qui construisons, investissons, mobilisons les deniers publics pour que le cadre d’accueil soit à la hauteur des besoins, nous sommes les premiers déçus, même parfois colère de voir que pendant que nous faisons des efforts, on supprime des moyens humains pendant que nous faisons des efforts. »
Pour le Président de l’exécutif régional, il faudra bien que chacun prenne ses responsabilités. Premièrement pour travailler mieux et plus les uns avec les autres. Deuxièmement pour expliquer que « cette politique de peau de chagrin n’est pas tolérable dans un contexte où le monde moderne exige des qualifications plus élevées, des métiers mieux pris en compte par les jeunes et une élévation globale des compétences de notre jeunesse lorsqu’il s’agit de la faire entrer dans le marché du travail. »
Selon Jean-Paul Bachy, le Conseil régional a l’intention d’être solidaire de toutes les initiatives qui peuvent être prises pour harmoniser, voire élargir l’offre de formation. C’est dans cette perspective qu’il a rappelé avoir accepté l’invitation des enseignants du lycée de Givet à échanger sur « leurs propres perspectives d’avenir », avant de lancer un avertissement, « mais que l’on arrête de raisonner «petits bras », en fonction d’intérêts locaux ! »
Un projet politique
Pour le Président, chacun (Etat, Région, Département) doit faire en sorte de donner un avenir aux Ardennes et à la Champagne-Ardenne. Et en ce qui concerne le département, sa pensée va « plus particulièrement à cette Vallée de la Meuse qui a bien besoin d’une attention privilégiée de la part des uns et des autres. »
Loin du pessimisme ambiant, Jean-Paul Bachy a martelé que l’avenir du territoire devait fédérer les forces politiques et les élus. Au risque de surprendre son auditoire, il a qualifié les Ardennes de « territoire exceptionnellement compétitif sur le plan industriel, qui doit cependant subir un certain nombre de mutations douloureuses.»
Et pour passer ce mauvais cap, il préconise de « tenir compte d’abord de la situation sociale des gens, de leurs compétences, de leur avenir, de leurs espoirs. Ne pas les décevoir, mais faire en sorte d’aller vers l’avenir… S’appuyer sur les savoir-faire industriels de cette Vallée pour reconstruire une industrie et une économie plus dynamiques, dans les Ardennes comme sur l’ensemble de la Champagne-Ardenne, ça, c’est un projet politique qui tient la route. »

Le manque d'entretien de la voie ferrée Charleville-Givet a été critiqué par le Président de la Région Champagne-Ardenne, qui a investi dans la modernisation du parc des TER. (Photo @rdenne-mag)
Ligne Charleville-Givet
Autre sujet de préoccupation, celui de la ligne Charleville-Givet, dont le manque d’entretien contraste avec les efforts financiers de la Région pour la rénovation des trains (40 millions d’euros). Si le matériel roulant est parmi les plus modernes de France, l’état de la voie handicape l’avenir de la liaison, et les élus locaux s’en émeuvent, parce qu’ils n’ont pas la main.
Une nouvelle fois, Jean-Paul Bachy a invité chacun à prendre ses responsabilités et s’est adressé, à celles et ceux « qui parlent au nom de l’Etat, ici ou ailleurs », pour leur rappeler que seuls l’Etat et RFF ont en charge l’état des voies. Il a rappelé l’urgence de réaliser des investissements sur cette infrastructure afin que les jeunes, les salariés, les familles puissent voyager dans des conditions décentes de Charleville à Givet… sans espérer toutefois atteindre les 160 km/h que la sinuosité du parcours n’autoriserait pas !
Des conditions de vie qui soient dignes du 21ème siècle et correspondent aux besoins élémentaires de la population, voilà que le président du Conseil régional espère pour les Ardennais, et particulièrement ceux de la Vallée et de la Pointe. « C’est une bataille sur laquelle il faudra fédérer un certain nombre d’initiatives et de bonnes volontés. (…) Faisons en sorte que les choses bougent et qu’elles bougent dans la bonne direction. »