La Framboise Frivole a rassasié les spectateurs de l’Espace Jean Vilar lors d’une représentation qui s’est presque jouée à guichets fermés. « Delicatissimo », le troisième opus du duo belge a emporté la salle dans un véritable tourbillon musico-gastronomique.
Peter Hens est tombé tout petit dans la marmite. Fils d’une célèbre cantarice, qui rêvait de le voir devenir chef… de cuisine, Peter s’est mis au piano, mais pas celui des étoilés du Guide Michelin. Plus classiquement, il s’est inscrit au conservatoire d’Anvers.
Son histoire est celle d’un surdoué qui, après avoir étudié le chant lyrique, le piano et le violoncelle, a fait éclater les carcans. Directeur d’orchestre, chanteur de jazz, chef de chorale, enseignant : il a tout fait, menant ses carrières parallèlement, comme un boulimique du travail.
Pour son troisième spectacle, Peter Hens a retrouvé son compère Bart Van Caenegem, pianiste virtuose et souffre-douleur consentant. Les deux lascars ont déniché leur source d’inspiration dans les poubelles, ou plutôt les corbeilles des maîtres de la musique classique. Chefs-d’œuvres égarés ou brouillons chiffonnés par un compositeur insatisfait, tout est prétexte à faire d’improbables découvertes.
Les œuvres de Bach, Beethoven, Chopin, Debussy, Ravel resurgissent entre deux mélodies de stars du rock ou de la musique pop, liées à la « sauce » Hens, avec la complicité de l’apprenti Bart. Au passage, rendons hommage à la voix sublime de Peter Hens, qui a époustouflé la salle.
I-Pad
« Delicatissimo » est conçu comme un festin, avec ses mises en bouches, son plat de résistance et ses mignardises. La technologie du 21ème siècle est intégrée au spectacle. L’I-Pad de Bart pourrait même être considéré comme le troisième personnage de ce numéro loufoque et grandiose, censé réconcilier des convives incultes en matière de grande cuisine musicologique.
Ecouter un piano jouer tout seul, enfin par I-Pad interposé, c’est un moment d’anthologie. Vendredi, un spectateur a d’ailleurs particulièrement goûté à cette fantaisie. Par deux fois, Patrice Petit, adjoint au maire de Rocroi, a joué les figurants. Peter Hens lui a même confié le fameux I-Pad. Et, il faut en convenir, le Rocroyen a composé un petit air qui valait bien du Schubert !
La vache folle était-elle au menu de cette soirée arrosée par… les rires des spectateurs ? Peter et Bart ont pris la scène de Jean Vilar pour la Route 66. Les voilà qui enfourchent le banc du piano comme s’il s’agissait d’une moto. Les deux hommes jouent à quatre mains sur cet improbable engin. Puis Bart fait de la voltige. Ça ronronne, ça pétarade. Mais Johnny Halliday peut repasser. Le public n’a d’yeux – et d’oreilles – que pour les duettistes flamands.
La Framboise Frivole… un menu musical à consommer sans modération.